samedi 20 septembre 2014

Vivre avec elle ...



 « (…) Pour vivre avec quoi que ce soit, pour vivre en compagnie de la laideur ou de la beauté, il faut une très grande intensité. Lorsqu’on vit avec ces montagnes jour après jour, si l’on n’est pas conscient de leur présence d’une façon très vivante, si on ne les aime pas, si on n’en voit pas à chaque instant la beauté, les couleurs changeantes, les ombres, on devient comme ces paysans qui y sont tellement habitués qu’ils ne les voient plus.  La beauté corrompt si on ne demeure pas très vivant dans le rapport qu’on a avec elle. Il en est de même de la douleur psychique : elle émousse l’esprit si on ne l’observe pas sans cesse avec intensité. Vivre avec elle ne la prolonge pas, au contraire : dès qu’on la voit dans sa totalité, elle n’est plus là. Ce que l’on voit, c’est-à-dire l’entière structure de la douleur, son anatomie, son intériorité – non des théories à son sujet, mais son fait réel, sa totalité -, nous quitte, cesse d’exister. La rapidité, l’acuité de la perception, dépend de nous. Si nous n’avons pas un esprit simple et direct, si nous sommes remplis du bruit de nos croyances, de nos peurs, de nos espoirs et désespoirs, voulant modifier le fait, le «ce qui est», nous prolongeons la douleur».

(Krishnamurti, Briller de sa propre lumière, Presses du Châtelet, 2013, p. 206)

 

1 commentaire:

Miche a dit…

Un texte d'une grande beauté parce que ces mots sont justes.
Intensité, du regard de Krishnamurti